Emilie, 2023, Collectif Awan (Guatemala)
« je suis partie 3 mois au Guatemala dans une communauté maya pour mon stage en coopération internationale»
«what trop stylé» ; « ça se met bien ici» ; « c’est pas dangereux là-bas?»
Voilà des réactions que j’ai entendues lorsque je raconte mon parcours de mes derniers mois. J’aimerais voir les images que les gens ont en tête lorsque je leur dis ça. Pour certain•es, cela doit sûrement être bien loin de la réalité que j’ai vécu. Et c’est normal, je ne m’étais pas du tout imaginé ça avant de vivre à Chaquijya.
« Et c’était comment ?»
Des paysages et des visages défilent dans ma tête et mon corps est submergé d’émotions. Comment je résume 3 mois de ma vie ? Peut-être juste en 3 mots.
1. Culture choc :
Je venais là-bas avec une envie d’apprendre davantage sur l’agroécologie et soutenir les projets locaux mais je me suis plongée dans une toute nouvelle culture. C’était beau et surprenant de vivre autour de personnes qui vivent autour d’une croyance. La culture maya fait partie d’eux et de leurs quotidiens, elle est leur racine. Même si maintenant dans beaucoup de familles, elle se mélange au Christianisme, dans chaque objet, nourriture ou habitude, il y a une explication symbolique liée aux traditions mayas. Il n’y a pas un jour où je n’ai pas découvert un nouvel élément de leur culture. Par ailleurs, la nature est un élément central pour les mayas qui va être vénérée à travers diverses cérémonies. Pour eux, les mayas font partie de la biodiversité et sont indissociables. Cette vision du monde m’a tout de suite plû car je ressentais au plus profond de moi ce qu’ils voulaient dire.
2. Communauté :
Le territoire est un élément important pour les mayas car c’est là que se construisent leurs communautés. Pour nous, on l’associerait à nos villages pourtant c’est bien plus que ça. Ces communautés sont organisées entre elles pour s’entraider et protéger leurs terres. Certaines personnes ont des rôles spécifiques mais tous se rassemblent souvent pour atteindre des buts communs et partager leurs savoirs. En effet, les mayas sont très autonomes au niveau organisationnel pour garantir une justice, une alimentation saine, un esprit critique, … Cette vivacité et indépendance est très inspirante et je la respecte beaucoup.
3. Famille :
Cette partie-là m’a particulièrement frappée. La famille est prioritaire dans les communautés mayas. La famille t’accompagne et te soutient tout au long de ta vie. Ce cocon familial est à la fois rassurant et divertissant. Certaines contraintes sont à noter mais j’y ai retrouvé plus de côtés positifs et d’appuie que nul part ailleurs. Là-bas, on grandit en famille, on travaille en famille, on mange en famille, on prie en famille, on voyage en famille, on joue en famille, on récolte en famille, on meurt en famille. De mon expérience, personne n’est mis de côté et tout le monde est intégré comme un membre de la famille. J’ai eu cette chance de tomber dans une merveilleuse famille qui m’a adopté comme leur fille. J’ai pû échanger sur nos différences, débattre sur le monde, participer aux tâches et jouer à la grande-sœur. C’est un rôle que j’avais déjà en Belgique mais que j’ai appris à chérir encore plus là-bas. Ces belles valeurs familiales m’ont permises de renouer avec ma famille belge et de revaloriser nos liens. Je tiens donc à remercier Mary, Fidel, Alan et Neto pour ce bel apprentissage.
Il y a tant d’autres choses que je voudrais vous partager de cette expérience de stage. Je retiendrais que celle-ci m’a permise de grandir personnellement et professionnellement en me connectant aux autres et à ma spiritualité. Le partage de connaissances et la confiance que le collectif m’a offert tout au long de mon stage m’ont particulièrement donné confiance en moi et en mes capacités professionnelles. Ces 3 mois dans cette communauté m’ont aussi donné encore plus d’énergie dans la lutte pour un monde plus solidaire.
Erika, 2022, Desmi (Mexique)
La famille dans laquelle je suis est très chouette, le contact est directement passé ! J’ai un peu eu du mal la première semaine pour m’adapter. C’était la première fois que j’étais aussi loin de chez moi et ça m’a quand même fait un gros choc quand j’étais installée, prête à débuter l’aventure mais maintenant, tout roule !
Par rapport à mon stage, je suis venue au bureau le lendemain de mon arrivée pour rencontrer les collègues et le jour d’après j’étais déjà en action ! A l’heure d’aujourd’hui, j’ai été en « mission » dans 4 communautés différentes. Pour le moment, je suis encore très spectatrice de ce qu’il se passe étant donné que je ne suis pas experte dans les thèmes travaillés au sein de DESMI. Cependant, je participe à chaque rencontre, je donne mon avis, je crée des liens avec les gens que je découvre etc. Les sorties sont, en général, très chouettes. Il arrive souvent que je reste dormir dans les communautés car celles-ci se trouvent loin. Il faut bien s’en rendre compte, le mode de vie est très très différent de celui que l’on peut connaitre et cela sur tous les niveaux.
Inès, 2020, Onamiap (Pérou)
J’ai réalisé mon stage dans l’association ONAMIAP, l’association nationale péruvienne des femmes indigènes andines et amazoniennes. Ce stage m’a permis de découvrir le monde associatif péruvien, les activités et le travail quotidien des membres de l’équipe.
Si j’avais fait des recherches sur les femmes indigènes péruviennes avant mon départ au Pérou, je me suis vite aperçue sur place que je ne connaissais encore que peu la thématique, tant les causes revendiquées et défendues par les femmes indigènes sont nombreuses et complexes. J’avais donc tout à apprendre. Je me suis rendu compte que les ouvrages théoriques ne reflètent parfois qu’une partie de la réalité et que le savoir livresque ne suffit pas. Cette expérience au sein des bureaux d’ONAMIAP m’a donc permis de confronter mes sources théoriques à la réalité du terrain. J’ai pu me renseigner sur des thématiques qui sont finalement peu traitées et peu considérées en Europe. Chaque activité à laquelle je participais était donc une opportunité de mieux comprendre les différents enjeux péruviens et de me familiariser avec l’actualité péruvienne.
Ainsi, pendant mes six semaines de stage, j’ai par exemple pu me renseigner sur les activités extractives qui sont menées au Pérou et observer la manière dont elles impactent le quotidien des femmes indigènes, engendrent de nombreuses violences et violent leurs droits individuels et collectifs. Ceci m’a permis d’observer les conséquences du modèle capitaliste, qui accorde plus d’importance à l’économie qu’aux conditions sociales et à la santé des femmes indigènes. J’ai pu prendre conscience des nombreuses discriminations et inégalités qu’elles vivent, notamment en ce qui concerne l’accès à la terre, aux différents espaces de décisions, etc. Toutefois, j’ai également pu observer toutes les formes de résistance qui sont mises en place par les organisations de femmes indigènes pour faire entendre leur voix et faire respecter leurs droits.
C’était réellement une chance de pouvoir intégrer l’équipe d’Onamiap parce que j’ai pu apprendre et vivre des choses que je n’aurais pas pu apprendre ailleurs. Je pense que c’est la richesse de pouvoir effectuer un stage sur le terrain. L’immersion dans un autre pays permet, en outre, de déconstruire certaines idées préconçues que l’on peut avoir mais également d’observer les choses à partir d’une autre réalité, de tenter de se détacher de ses « lunettes » occidentales. Cela permet aussi de questionner notre propre mode de vie et de penser. J’ai par exemple pu repenser le rapport au temps, à la distance et le lien que nous entretenons avec la terre ici en Europe. Enfin, cette expérience m’a amenée à sortir de ma zone de confort, à m’habituer à une autre forme d’organisation, à une autre culture.
Au-delà d’être une première expérience dans le monde professionnel, ce stage a été un bel échange interculturel. Ce que je retiendrai par-dessus-tout de mon séjour à Lima est l’engagement, l’humanité et la bienveillance de l’équipe d’Onamiap.
Noémie, 2020, ASOMOBI (Costa Rica)
Dans le cadre de ma dernière année de master en sciences de la population et du développement à l’Universite de Liege, j’ai eu la chance de réaliser mon stage au sein de la Asociación de Mujeres Organizadas de Biolley, au Costa Rica. Je cherchais un endroit de stage exclusivement féminin, car cela allait rejoindre mon sujet de memoire, et j’ai eu la chance de trouver ce que je désirais.
L’organisation de ma venue s’est faite entre MATM et ASOMOBI, ce qui était un peu plus facile pour moi puisque je ne parlais pas bien espagnol. J’ai donc donné les dates et la durée de mon stage et tout cela a été approuvée par l’association d’accueil.
L’arrivée au sein de l’association a été quelque peu aventureuse. Une fois arrivée
à San José où je suis restée une nuit, j’ai du faire 6 heures de bus en montagne pour ensuite me faire ramener au village de Biolley en voiture par des personnes de l’association pendant 1h30. On m’a directement amenée dans ma famille d’accueil, où je me suis installée et reposée tout un week-end. Ne parlant pas bien l’espagnol avant d’arriver au Costa Rica, j’ai eu du mal à m’intégrer dans ma famille et dans l’association, bien que ses membres ont été très attentionnés et gentils avec moi. L’adaptation à une nouvelle culture, une nouvelle langue et un nouveau mode de vie n’a pas été des plus faciles pour moi et a duré plus ou moins deux semaines. Je m’y suis cependant finalement habituée et j’ai adoré certains aspects. Mais je pense que cela a été plus facile notamment parce que deux autres étudiantes belges, maintenant devenues des amies, réalisaient également leur stage à ASOMOBI en même temps que moi, et que nous avions donc l’occasion de discuter de nos difficultés ou problèmes plus facilement. Mon expérience aurait été très différente sans elles.
Concernant mon travail à l’association même, tout a été très tranquille. Les tâches sont prédéfinies une semaine à l’avance avec la maitre de stage, et les prises d’initiative sont accueillies chaleureusement. C’est comme cela qu’en plus d’aider à transformer le café, à gérer l’auberge ou à créer des bijoux pour l’association, nous avons aussi décidé de rénover des bancs en y faisant de la mosaïque. La vie et le travail à l’association sont plutôt calmes, sans stress, c’est une tout autre mentalité que ce que nous pouvons connaître dans notre société du « tout tout de suite ». J’ai appris à devenir plus patiente, à profiter des temps libres, à travailler avec des femmes fortes et fières de leurs projets, à cuisiner, vivre et parler à la costaricaine.
Une expérience en résumé très riche humainement pour moi. J’en garde un excellent souvenir et je conseille vivement ASOMOBI comme endroit de stage pour tout étudiant intéressée par les projets de cette association.
Concernant les contacts avec MATM lors du stage, ils ont été occasionnels pour voir si tout se passait bien. Je trouve que c’est bien comme ça et qu’il n’en faut pas plus, car une fois arrivée sur place, j’étais plus impliquée dans la vie et le travail locaux que dans le fait de donner des nouvelles à MATM.
Antoine, 2019, Tuntiak Nunkee, Shuar Explorer (Equateur)
J’ai réalisé dans le cadre de mes études en Tourisme durable un stage à Sucua avec l’association Shuar Explorer. Après moins d’une semaine sur place je me suis rendu à Sucúa où j’étais destiné à passer un mois en famille d’accueil à travailler avec une communauté locale afin de développer leur projet de tourisme communautaire.
J’ai été hébergé par la famille de Galo Puwainchir, leader de la communauté Shuar de la réserve écologique Tuntiak Nunkee. Dès mon premier jour au sein de la famille je me suis senti partie intégrante de la famille. Bien que je ne parlais qu’un espagnol moyen, j’ai pu comprendre et parler assez rapidement étant donné que tous faisaient un effort pour parler plus lentement et plus simplement. Après deux semaines j’ai pu commencer à avoir de vrais échanges et des conversations constructives ce qui m’a permis d’effectue un travail très efficace quant aux différentes demandes de la communauté.
Cet échange m’a permis d’apprendre à certains membres de la famille à développer une stratégie de communication et à se servir des réseaux sociaux pour accroître leur notoriété mais surtout, j’ai pu apprendre énormément du mode de vie de la famille et des Shuar en général, de la culture, les idéaux et le rapport très important à la nature. A travers cette immersion je me suis retrouvé dans des moments d’incompréhension et de remise en question à de nombreuses reprises. Le mode de vie simple et communautaire m’a appris beaucoup en termes de gestion de conflits, d’organisation collective, de maitrise de soi, d’écoute et de patience.
Ce n’était pas la première fois que j’ai pu vivre au sein d’une famille d’accueil. Cependant c’était ma première expérience dans de telles conditions de précarité. En effet la maison dans laquelle j’ai été accueilli était très modeste. 4 murs en bois sans porte d’entrée, une cuisine des plus simples, un système d’électricité assez défaillant, des grillages pour fenêtre accueillant tous les moustiques et insectes du voisinage… J’ai pu prendre conscience du coté superflu de toutes les possessions dont on s’encombre au quotidien dans notre mode de vie occidental. L’essentiel réside en fait dans la simplicité, le rythme des journées et l’échange perpétuel.
L’Equateur, dont je n’avais pas tant entendu parler auparavant, est un pays qui a définitivement marqué ma vie : sa beauté, sa diversité, son peuple et sa motivation à défendre ses idéaux, ses délicieux fruits, sa faune et flore, ses montagnes et volcans, ses lagons, ses forêts pleines de vie, cet air si pur et son accueil chaleureux ont fait de ce voyage une expérience de vie inoubliable.
Finalement, on pourrait croire en se rendant en stage pour apporter une aide et un soutien à une communauté ou une association locale que le travail va se faire dans un sens seulement, que nous apportons nos connaissances et que sans le travail que nous effectuons la communauté n’en serait pas là, mais c’est entièrement faux ! Les peuples indigènes d’Amérique latine ont tellement à nous apprendre et leur rapport à la nature, aux relations humaines est tellement riche qu’il serait une erreur de ne jamais vouloir tenter l’expérience !